"Partir, revenir" de Claude Lelouch (1985)

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Toujours juste sous l’emphase, Lelouch exorcise l'horreur de la guerre avec un sens consommé du romanesque... et la musique de Rachmaninov.Simon et Sarah Lerner ont deux grands enfants : Salomé, romantique et ombrageuse, et Salomon, qui rêve de devenir pianiste de concert. Leurs amis, Hélène et Roland Rivière, se font du souci pour leur grand fils : Vincent, un passionné, légèrement excentrique, qui pratique le funambulisme et donne des sueurs froides à sa mère. Quand la Seconde Guerre mondiale éclate, les Lerner doivent fuir, à la suite de la dénonciation de leur concierge, exaspérée par les exercices continuels de Salomon. Ils trouvent refuge à la campagne, chez leurs amis Rivière, qui les accueillent chaleureusement dans le vieux manoir qu’ils ont acheté. Mais la prison dorée s’avère vite étouffante. Confinés au château, les Lerner se morfondent. Ils se sentent de trop et Vincent effraie Salomé en lui tournant autour.L’art comme antidoteSeule Salomé (Evelyne Bouix, tout de rage contenue) reviendra des camps de concentration, déterminée à confronter les habitants du château et du village à cette question dérangeante : qui a écrit la lettre qui a provoqué l’arrestation des Lerner ? Quel est le motif de cet acte infâme qui a provoqué la mort des siens ? Enfant juif pendant la guerre, Claude Lelouch a dû se cacher avec sa mère, pour échapper à la Gestapo. Il a connu ce sentiment d’angoisse et ces fuites précipitées. Dans ce film, il aborde pudiquement le thème de la délation avec un mélange de réalisme (les raisons parfois triviales ou tristement humaines qui font qu’on passe à l’acte) et un halo protecteur de romanesque : démarrage sur les chapeaux de roue, château de conte de fées, passions contrariées… Entrelaçant son intrigue et les souvenirs de Salomé, devenue écrivaine et vedette de l’émission littéraire Apostrophes, reconstituée pour l’occasion (avec Bernard Pivot et BHL en personne), dispensant généreusement la musique de Rachmaninov, qui donne sa pulsation au film, le cinéaste affirme, avec une naïveté non dépourvue de panache, sa foi en l’art et l’amour comme antidote à l’horreur. Il offre aussi à Annie Girardot (Hélène) un rôle de mère excessive à la mesure de son sens du tragique, réconciliant l’actrice avec la critique, qui salua unanimement sa performance.

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